Julio Fièvre
18 février 1940 – 8 octobre 2012
Papa Julio était avant tout un éducateur talentueux et respecté de tous. D’une rare distinction et d’un charme exquis, il a formé de nombreuses générations, d’abord au Collège Canado Haïtien et ensuite au sein de plusieurs universités, parmi lesquelles l’Université d’Etat d’Haïti, la GOC, et l’Université Notre-Dame d’Haïti. Un éducateur au travail bien fait et réalisé jusqu’au bout, personne n’oubliera, j’en suis sure, sa grande disponibilité.
Dans une communauté souvent fermée et jalouse, il tranchait par la générosité admirable de son accueil, la persévérance avec laquelle il encourageait de jeunes talents, sa passion indéniable pour les débats d’idées, ses encouragements si désintéressés. Qualités morales si rares, si dignes d’éloge, si difficiles à pratiquer quotidiennement! Et pourtant si nécessaires!
A la maison, il ne pouvait s’empêcher de continuer d’exercer cette fonction d’éducateur. A ses quatre filles, il racontait souvent des anecdotes devant nous éclairer. Il rapportait souvent des ouvrages devant nous inculquer des principes importants pour la vie. Ces livres qu’il nous offrait meublaient notre imagination et aiguisaient nos connaissances. Papa voulait que ses petites chéries deviennent des jeunes femmes bien formées, tant sur le plan moral que sur le plan académique. Avec l’exigence qu’il avait d’abord envers lui-même, il était un éducateur à l’effort, à la persévérance dans les engagements, au goût de donner le meilleur de soi-même.
Papa Julio, tu vois aujourd’hui notre peine. Nanie, Patou, Jenny et moi sommes toutes les quatre éplorées. Stoïque, tu n’aimais pas voir couler les larmes. Mais, Papa, comment combler ce vide?
J’imagine ta réponse: Jessoue, il y a trois paroles qui guérissent.
La première, c’est MERCI.
Merci, Papa, pour ta générosité, pour tes conseils. Je sais que parfois nous roulions des yeux, mais l’expérience nous a appris que souvent tu avais raison. Merci d’avoir été un modèle pour tes filles, nous poussant à l’excellence. Dans la vie de tous les jours, nous avons voulu suivre tes traces en étant, comme toi, attentives aux autres, pétries d’altruisme, mais surtout nous avons appris à ne jamais nous laisser marcher sur les pieds, à garder la tête haute, à ne jamais oublier que nous sommes les filles Fièvre. Tu étais un homme fier et digne et personne n’aurait pu te rabaisser même s’ils passaient leur vie à essayer. Ca, ne le tenons toutes de toi. Nous savons qui nous sommes et ne l’oublions jamais.
Merci pour la fierté qui illuminait tes yeux quand tu nous regardais; tu nous as appris à reconnaitre l’amour dans un simple regard.
Merci pour tes embrassades et tes baisers. Merci pour l’attention que tu ne cessais de nous porter. Merci pour les soins que tu nous as prodigués quand nous étions malades. Avec maman, tu veillais, restais à notre chevet, papa attentif, papa aimant, papa docteur, nous forçant à avaler pilules et potions qui nous mettaient d’aplomb le jour suivant en dépit des grimaces et des jérémiades.
Merci de nous avoir aimées en dépit de nos défauts, de nos faiblesses.
La deuxième parole qui guérit: PARDON
Papa, tu avais un tempérament difficile. Ah, tout le monde le sait. Mèt Fièvre se yon numewo, ils disaient! Qui s’y frotte, s’y pique, ce qui souvent forçait tes filles à garder leurs distances. Mais malgré tes terribles colères, malgré ta maladresse, nous t’aimions beaucoup, et tu le savais. Pardon, quand même, pour toutes les fois où nous n’avons pas cherché à te comprendre, à t’apprécier. Pardon pour toutes les fois où nous t’avons dit un mot blessant, où nous avons eu à ton égard un geste insensible. Où nous avons critiqué méchamment certains choix que tu as faits. Tu croyais à la vie et à l’audace qui lui est liée. Tu n’avais de cesse de t’instruire, non pour ton plaisir personnel, mais pour le partager, pour le transmettre. Pour accomplir ce que tu as achevé, il faut un cœur persévérant, une intelligence tout à la fois aiguë et ouverte, et une curiosité d’esprit insatiable. Pardon, Papa, pour toutes les fois où nous avons été indifférentes à ton affection, la prenant pour acquise.
La troisième parole qui guérit, Papa, c’est JE T’AIME
Nous ne te l’avons pas dit assez. Aujourd’hui, nous le crions: Papa, nous t’aimons. Nous voudrions le répéter encore et encore. Tu as été un père et un grand-père exceptionnel. Tes petits enfants, particulièrement Clélie et Marc-Olivier, t’adorent, nous le savons, et nous te remercions pour la tendresse et l’affection que tu leur as démontrées. Marc-Olivier ne pouvait se passer de son grand-père, insistant a passer ses soirées avec toi devant la télé, s’endormant si souvent au creux de tes bras! Notre louange s’adresse à l’homme que tu fus, Papa, dont l’exemple a fait leçon pour nous à travers le temps, et nous inspire encore aujourd’hui, bien que nous ne nous y égalons que fort imparfaitement.
Nous rendons grâce au Seigneur pour tout l’apport éducatif que tu as fait rayonner en nous. Que maintenant, auprès de Dieu, ta prière d’éducateur se prolonge en intercession pour nous-mêmes et pour les jeunes d’aujourd’hui.